Philippines : le droit à la santé sous la présidence Marcos
Le fils du dictateur des Philippines, Ferdinand Marcos, a remporté l’élection présidentielle du pays. Ferdinand “Bongbong” Marcos, Jr. a pris une avance incontestable sur sa plus proche rivale, Leni Robredo, l’actuelle vice-présidente du pays.
Le retour des morts
Pendant plus de 20 années au pouvoir, le vieux Marcos a pillé le pays et commis des violations flagrantes des droits humains. Des milliers de personnes ont été emprisonnées, torturées, tuées ou sont disparues sous sa dictature. En 1986, une révolte populaire a chassé Marcos, mais pas avant qu’il n’ait dépouillé le pays de plus de 10 milliards de dollars et mis son économie en lambeaux.
Après la mort du dictateur en exil en 1989, la famille Marcos a pu rentrer aux Philippines et a commencé à faire son retour en politique. Elle n’a jamais reconnu ses torts ni présenté d’excuses pour les violations des droits humains et n’a cessé de mentir au sujet des richesses qu’elle a pillées. Les gouvernements successifs n’ont pas demandé de comptes à la famille Marcos pour ses crimes contre le peuple philippin.
Avec l’aide des médias sociaux et d’une armée de trolls, les Marcos ont réussi à blanchir l’odieux héritage de la dictature Marcos et l’ont même remodelé en “âge d’or” des Philippines. De plus, ils ont utilisé les réseaux sociaux pour mener des campagnes de diffamation contre leurs opposant·e·s, particulièrement Leni Robredo.
Selon certain·e·s analystes politiques, beaucoup de Philippin·e·s ont soutenu Marcos, de plus en plus déçu·e·s de la démocratie libérale qui a dominé après l’éviction de Marcos, et qui n’a pas réussi à apporter de réels changements au pays. La pauvreté est toujours répandue, la corruption au sein du gouvernement s’est aggravée et le fossé entre riches et pauvres s’est creusé, le pays présentant l’un des pires indices d’inégalité de revenus au monde. Marcos a capitalisé sur le sentiment des gens d’être victimes du système dominant en créant un récit selon lequel sa famille est également victime d’une conspiration de l'”élite”.
Les mouvements sociaux progressistes ont soutenu la candidature de Robredo dans le but d’empêcher le retour des Marcos au pouvoir. Au-delà de cela, les plans socio-économiques de Robredo concordent avec leurs plaidoyers sur diverses questions telles que la promotion du droit à la santé, la défense des droits humains et de l’environnement, une véritable réforme agraire, la fin de la contractualisation du travail et une réponse aux pandémies fondée sur les droits.
À l’heure de rédiger ces lignes, les manifestations contre la victoire imminente de Marcos s’intensifient, divers groupes ayant dénoncé les fraudes et irrégularités présumées qui ont entaché le processus électoral.
Le droit à la santé menacé aux Philippines sous la présidence de Marcos
Quelles sont les perspectives pour la défense du droit à la santé sous la présidence de Marcos ? Le retour au pouvoir des Marcos représente à la fois des défis et des opportunités pour les mouvements sociaux. Pendant la campagne électorale, Bongbong Marcos n’a présenté aucun programme politique, évitant les débats présidentiels et s’en tenant à un message ambigu d’unité. Il a promis de poursuivre les plans et les programmes du président Duterte. Il s’est engagé à éviter à Duterte de devoir rendre des cdu pays. Ferdinand “Bongbong” Marcos, Jr. a pris une avance incontestable sur sa plus proche rivale, Leni Robredo, l’actuelle vice-présidente du pays.omptes et d’être exposé à toute procédure judiciaire internationale pour ses violations des droits humains, sa guerre sanglante contre la drogue à la répression des dissident·e·s, l’emprisonnement et l’assassinat de défenseur·e·s des droits humains et de l’environnement.
Ses détracteur·e·s craignent que M. Marcos n’intensifie la culture de l’impunité instaurée par le président Duterte, réduisant encore l’espace démocratique dans lequel les mouvements sociaux peuvent agir et tenir le gouvernement pour responsable de ses actes.
Quels pourraient être les éventuels impacts de la présidence de Marcos sur l’action des partenaires de Viva Salud? Marcos héritera d’un système de santé publique chroniquement malade. Sous sa présidence, Duterte a accordé la priorité à la police et à l’armée, au détriment de la santé, même pendant la pandémie du COVID-19. Duterte n’a pris aucune mesure pour renforcer le système de santé publique et rendre les services de santé accessibles aux gens du peuple. Il s’est plutôt appuyé sur le schéma néolibéral de privatisation des soins de santé par le biais de l’assurance maladie sociale. Les mouvements sociaux ne doivent pas s’attendre à ce que le programme de santé de Marcos soit différent de celui de Duterte. Ils peuvent même présumer que Marcos poussera le système de santé publique encore plus loin dans l’effondrement, car lorsque Duterte quittera le pouvoir, la dette du pays atteindra le niveau record de 13,42 trillions de pesos (243,5 milliards d’euros).
La lutte pour la justice sociale dans un espace démocratique réduit
La campagne pour le droit à la santé menée par les partenaires de Viva Salud aux Philippines est aujourd’hui plus cruciale que jamais. Un vaste mouvement de masse a émergé pendant la campagne électorale, soutenant la candidature de Robredo et rejetant la tentative de Marcos de revenir au pouvoir. Des personnes issues de différents secteurs de la société, en particulier les jeunes, ont pris l’initiative de lutter contre les distorsions historiques, d’exposer les crimes et les richesses des Marcos, et de demander justice et reddition de comptes.
Cela offre une grande opportunité aux mouvements sociaux d’organiser et de mobiliser ces personnes pour défendre le droit à la santé. Il est crucial de se rappeler que l’élection n’est qu’une partie d’une lutte plus large pour un changement significatif. Les Philippines sont confrontées à une crise sanitaire et économique due aux impacts de la pandémie de COVID-19. Les mouvements sociaux peuvent rallier la population pour affirmer que la santé des gens est avant tout une responsabilité de l’État et exiger que le gouvernement veille à ce que le système de santé publique puisse fournir efficacement des services de santé à la population, en particulier pendant une crise sanitaire telle que la pandémie du COVID-19.
La répression politique va probablement s’intensifier sous la présidence de Marcos. Les mouvements sociaux, cependant, sont prêts à mener une lutte déterminée pour défendre ce qui reste de l’espace démocratique sous Duterte, afin de continuer à se battre pour le droit du peuple à la santé et lui donner les moyens de provoquer un changement social.