Les travailleurs·euses de la santé aux Philippines ne sont pas des cibles !
Les soins de santé aux Philippines souffrent d’une maladie chronique. Mais ceux qui en parlent sont victimes de la répression. Les agent·e·s de santé privés et plus encore du service public sont exposé·e·s à de réelles situations de violence.
Système de santé pour les malades chroniques
Le système de santé philippin est chroniquement malade. Le budget national de la santé est beaucoup trop faible. Le gouvernement dépense 50 dollars par personne et par an pour les soins de santé. Dans d’autres pays d’Asie du Sud-Est, c’est le double. En conséquence, la majorité de la population n’a pas ou peu accès à des soins de santé de qualité.
Le pays ne compte que 1,2 lit d’hôpital pour 1 000 habitants. Ce chiffre est comparable à celui des pays les plus pauvres du monde. Dans les zones rurales, la moitié des Philippin·ne·s doivent faire un trajet de plus de 30 minutes pour se rendre dans un centre de santé. À peine 13 % du personnel de santé et 40 % des hôpitaux se trouvent dans les zones rurales.
Enfin, le rapport entre le personnel de santé et la population reste lamentablement bas dans tout le pays : on compte un·e médecin pour 27 236 personnes, un·e infirmier·e pour 4 852 personnes, un·e sage-femme pour 5 111 personnes et un·e dentiste pour 55 293 personnes. Les bas salaires, l’absence d’avantages sociaux et les mauvaises conditions de travail contraignent de nombreux·euses travailleurs·euses de la santé philippin·ne·s à chercher du travail à l’étranger.
Les professionnel·le·s de la santé dans le collimateur
De nombreux·euse travailleurs·euses de la santé philippin·ne·s font entendre leur voix sur l’état déplorable des soins de santé dans le pays. Ielles rappellent au gouvernement ses manquements et surtout son devoir de protéger ainsi que de promouvoir le droit à la santé de la population. Ils lancent des campagnes, font pression sur le gouvernement et nouent des alliances avec d’autres organisations pour améliorer la santé publique. En raison de leurs critiques, de nombreux·euses travailleurs·euses de la santé se confrontent à la répression étatique.
On assiste à une vague croissante de violence contre les médecin·e·s et les travailleurs·euses de la santé progressistes. Ils sont victimes d’intimidations, d’arrestations illégales et parfois même de meurtres. Cette criminalisation prive plus encore la population des services de santé essentiels.
Les décès du Dr Sancelan et de Zara Alvarez
Jusqu’en décembre 2021, 427 défenseurs·euses des droits humains et travailleurs·euses de la santé ont été tué·e·s aux Philippines. Le Dr Mary Rose Sancelan et Zara Alvarez, qui ont toutes deux consacré leur vie au service des communautés vulnérables de l’île de Negros, figurent parmi les victimes. Elles ont joué un rôle important dans la lutte pour le droit à la santé aux Philippines
Le Dr Mary Rose Sancelan était la responsable municipale chargée de la santé dans la ville de Guihulngan, dans la région du Negros Oriental. Elle dirigeait l’agence chargée d’enrayer la propagation du COVID-19 au sein de la ville. Le 15 décembre 2020, elle et son mari ont été abattu·e·s par deux hommes armés alors qu’ielles rentraient chez eux. Le Dr Sancelan était la seule docteure de cette ville de plus de 100 000 habitants, pour la plupart des petit·e·s agriculteur·rice·s et des pêcheur·euse·s.
Zara Alvarez était une militante des droits de l’homme connue pour son engagement sans faille dans la lutte des agriculteur·rice·s, des ouvrier·e·s agricoles et d’autres groupes marginalisés dans sa province natale de Negros. Zara a également travaillé en tant que responsable politique pour le programme de santé de l’île de Negros (NIHIP). En conséquence, elle est devenue la cible de la répression de l’État. Elle a été qualifiée de terroriste et recevait constamment des menaces de mort.
Néanmoins, Zara a continué à se battre pour le droit des gens à la santé. En août 2020, Zara a été abattue par des inconnu·e·s. Son nom s’est ainsi ajoutée à la longue liste des militant·e·s et défenseur·euse·s des droits humains tué·e·s aux Philippines. La mort de Zara a plongé ses collègues du NIHIP dans un état de peur permanent. Cela a sérieusement affecté leur santé mentale. Certain·e·s de ses collègues du NIHIP ont abandonné leur poste et se sont tu·e·s de peur d’être les prochain·e·s visé·e·s.
#NotATarget
Les travailleurs·euses et militant·e·s de la santé ne devraient jamais être la cible de la violence ou de la répression. Ils jouent un rôle crucial dans la lutte pour le droit à la santé. Heureusement, nos partenaires Karapatan, Gabriela, IBON et le Conseil pour la santé et le développement n’abandonnent pas ce combat. Ielles garantissent que les communautés vulnérables aient un accès à aux soins, iellesidentifient les problèmes les plus importants et sensibilisent la population aux injustices dont elle est victime. De cette manière, iellels agissent ensemble pour un meilleur accès à la santé.
Ielles se font également entendre sur la scène internationale. Du Mouvement pour la santé du peuple aux Nations unies. Avec des partenaires internationaux, tels que Viva Salud, ielles défendent la situation des Philippines auprès de politicien·ne·s et de militant·e·s étranger·e·s. Il s’agit de demander des comptes au gouvernement philippin et de réclamer une enquête sur les multiples violations faites à l’encontre des droits humains dans le pays.
Vous aussi, vous pouvez faire votre part ! En décembre, nous ferons entendre notre voix auprès de la Ministre du développement Caroline Gennez. Voulez-vous également prendre une photo avec un message de solidarité pour les travailleurs·euses de la santé et les militant·e·s philippin·ne·s ? La solidarité internationale commence maintenant !
PODCAST : BEING A HEALTH ACTIVIST IN THE PHILIPPINES
Viva Salud a lancé en septembre la campagne #NotATarget. Sur Spotify un podcast a été lancé sous le même nom, on peut y entendre davantage de témoignages de Kat, Tinay et d’autres activistes de la santé.