Des pesticides et du colonialisme
Ce texte a été écrit par Ubai Al-Aboudi, directeur exécutif du Bisan Center for Research and Development et chercheur dans le domaine des droits socio-économiques.
Le colonialisme ne fait pas partie des livres d’histoire. Ses effets sont toujours présents : racisme, traités commerciaux inéquitables, pillage des matières premières dans les anciennes colonies.
Le colonialisme découle directement du capitalisme. Il fait croître la richesse d’un petit groupe de personnes, sans tenir compte des conséquences sur la plus grande partie de la population mondiale et sur la planète. On peut très bien l’observer dans l’agriculture monocapitaliste. Production et productivité doivent augmenter sans cesse pour permettre davantage de profits.
Nuisible pour la santé et l’environnement
Les produits chimiques jouent un rôle important dans ce processus. Il y a cinquante ans, on ne savait pas grand-chose des pesticides. On ne se souciait pas vraiment de leurs effets sur la santé. Depuis lors, les recherches ont montré que l’utilisation des pesticides provoque de graves problèmes de santé affectant le fonctionnement des reins, du foie, provoquant des tumeurs cancéreuses. Et ceci, tant pour celles et ceux qui les utilisent que pour celles et ceux qui consomment la nourriture contaminée. Les recherches montrent également que l’usage intensif des pesticides affecte profondément l’environnement. La biodiversité diminue fortement dans les régions où les pesticides sont utilisés. Cela ne touche pas seulement les générations actuelles mais met également en danger l’avenir de l’humanité sur notre planète.
Interdits ici, importés ailleurs
Le cœur du problème, c’est la production de pesticides par des entreprises d’agrochimie dans les pays à haut revenu. Au sein de l’UE, la production de pesticides est soumise à des règles strictes. Malheureusement, il y a un gouffre entre les règles de production et celles appliquées à la production et à la vente des pesticides.
Certains pesticides, comme le CYPRIN en Suisse, POLICE et PLICTRAN au Luxembourg, EVISECTS en Belgique, sont interdits en UE en raison de leur toxicité. Celle-ci est bien trop élevée pour les organismes vivants dans l’eau, ils présentent un risque au niveau du foie et des reins et peuvent affecter le système reproductif chez les femmes comme chez les hommes.
Malheureusement, on continue à produire et exporter ces pesticides toxiques dans des pays hors UE, comme la Palestine, sans tenir compte de leurs effets sur la santé et l’environnement. Cela rappelle les pratiques de l’époque coloniale, axées sur une maximalisation des profits sans égards pour le bien-être de la population.
Pesticides en Palestine
Nous avons réalisé, avec le Bisan Center for Research and Development, une recherche sur la présence de pesticides interdits dans les territoires occupés de Cisjordanie, en Palestine. Elle a montré la présence d’un certain nombre de ces pesticides dans les produits sur les marchés palestiniens. Au cours d’entretiens avec des paysan·ne·s et des propriétaires de magasins vendant des pesticides, nous avons découvert qu’une partie de ces pesticides provient d’Israël, et plus précisément de ses colonies illégales. L’importation des pesticides n’est donc pas seulement une question de santé et d’environnement, mais elle touche également au contrôle de la Palestine de son propre pays et des passages frontaliers.
Des résidus de ces pesticides ont par ailleurs été trouvés dans des fruits et légumes exportés vers l’UE. La production et l’exportation des pesticides n’est donc pas seulement nocive pour la population des pays qui continuent à les importer, mais aussi pour la population des pays qui exportent les pesticides interdits tout en important des aliments contaminés.
Il existe des alternatives
L’utilisation de pesticides dans l’agriculture est une pratique non écologique et très nocive pour la population mondiale. Le modèle agricole monocapitaliste a atteint ses limites. Il n’est pas capable d’augmenter la production agricole sans porter gravement atteinte au bien-être de l’humanité et des générations futures. Il est donc d’une importance cruciale pour l’avenir de notre planète que l’on crée des alternatives et adapte les mêmes normes à l’exportation et l’importation des pesticides. Il y a suffisamment de méthodes alternatives de production agricole : agro-écologie, agriculture durable, polyculture. Il faut dès maintenant, investir massivement !
Mobilisons-nous !
Viva Salud fait partie d’une coalition menée par SOS Faim pour mettre fin à l’exportation de pesticides interdits.
Mobilisons-nous pour appeler la Belgique à interdire ce commerce toxique et immoral en signant et partageant notre pétition !